Près d’Arras, Vincent quitte le café où il a grandi
Pendant 25 ans, le père, puis les fils ont fait tourner le Marœuil. La fin d’une époque


Vincent Voisin avait espéré une fin différente : « On voulait louer la salle des fêtes. Faire une soirée de remerciements avec les clients, les anciens salariés et présenter les repreneurs mais c’est une année particulière », regrette le gérant du bar-tabac le Marœuil. Si particulière que trois jours avant la fermeture définitive, le voici cas contact : « Mon salarié a le Covid ». Les rideaux sont fermés depuis le 13 janvier. La fin d’une histoire, celle de ce qui était bien plus qu’un café de village : le Marœuil.
1994-2010 : les années Christian Voisin
Christian Voisin a poussé son premier cri à Marœuil. En 1994, il prend congés de la gendarmerie et revient au village natal pour reprendre le K 2000, « comme la série télé à la mode ». Le retraité se souvient : « En arrivant, on a beaucoup cassé pour agrandir. » Il récupère également un gallodrome dans la cour de l’établissement. Trois ans de combat de coqs avant de transformer l’espace en salle de réception.
« C’était un lieu d’animation, les gens
ne venaient pas que
pour boire. »
Christian Voisin
2010-2016 : les années Mathieu Voisin
En 2010, le paternel cède l’affaire à Mathieu, l’un de ses jumeaux. « Je n’avais que 23 ans et mes parents ne voulaient pas que je reprenne l’affaire », se remémore l’intéressé. Le jeune taulier impose ses règles, modernise l’établissement en 2013 mais surtout impressionne par sa motivation : « Je faisais jusqu’à 90h par semaine. C’est un métier difficile mais c’est aussi un métier merveilleux. On a créé beaucoup de liens. » Et organiser quelques fêtes hors les murs du Marœuil : « La première année qu’on a fait le Beaujolais nouveau, on était 200. On ne tenait pas dans le café, on a dû louer la salle des fêtes en catastrophe. » Aussi éreinté que fier du travail entrepris, Mathieu cède la place à son jumeau en 2016 avec qui il organisait l’événement Campagne en fête.
2016-2021 : les années Vincent Voisin
Enseignant dans l’hôtellerie et restauration, mais aussi entrepreneur dans l’événementiel, Vincent poursuit le développement du Marœuil en imposant sa patte, comme l’ont fait ses prédécesseurs : « On a fait une soirée par mois. J’ai développé un service traiteur en 2018 et, en septembre de cette même année, j’ai créé la brasserie. » Il ne le sait pas encore quand il reprend l’établissement mais il sera le dernier Voisin à sa tête. Une décision qui n’est pas liée à la crise sanitaire : « J’ai besoin d’une vie plus saine, plus organisée et avec d’autres projets. »
Le Marœuil ne rouvrira que le 22 janvier. Derrière le bar, on retrouvera Karine Lavoisier. Vincent sait que l’affaire est saine et entre de bonnes mains. Dans les prochains jours, il doit remettre les clés à la repreneuse. Il le concède : « Ça va faire mal au cœur. »