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Le jour où Franck est devenu Thilliez

Tombé enfant dans l’écriture, tel Obélix dans le chaudron de potion magique ? Certes pas. Alors, comment Franck Thilliez est-il devenu ce raconteur d’histoires tenant en haleine des milliers de lecteurs bien au-delà de la France ? Quelques jours avant la sortie de 1991, son prochain roman, l’auteur de Mazingarbe dit tout.

Journaliste
Temps de lecture: 4 min

Presque irréel. Il y a toujours une forme d’incrédulité à se dire que son voisin est un auteur à succès.

L’idée est d’autant plus particulière à intégrer quand le voisin en question se nomme Franck Thilliez. Certes, on ne le croise pas toutes les deux secondes chez le boulanger. L’homme travaille énormément. En revanche, il se montre très accessible. Quant à sa gentillesse et à sa simplicité, il suffit d’observer l’étincelle dans son regard pour sentir qu’elles ne sont pas feintes.

De l’enfant de Bully-les-Mines à Arcelor

Bref, un monsieur-tout-le-monde avec une belle dose d’humanité et du caractère. On l’imagine aisément en collègue parfait. Ce qu’il a d’ailleurs probablement été. Car Franck Thilliez a commencé sa vie bien loin de toute velléité artistique. L’écouter est presque comme se regarder dans un miroir quand on a été ado ou jeune adulte dans les années 1980-1990. « J’ai grandi à Bully-les-Mines en toute simplicité. Mes parents étaient de là-bas. Je suis allé au lycée de Liévin route d’Arras. J’ai passé mon bac. Après je suis parti en école d’ingénieur à Lille. Et j’ai commencé à travailler en entreprise, dont Arcelor sur Dunkerque.  »

Il dévore les films d’horreur

Il l’assure : jamais l’idée de raconter des histoires ne l’effleure. En revanche, garçon bien dans son époque, il a sa carte au vidéoclub du coin. Et il la fait chauffer.

« Tous les samedis, j’allais chercher une pile de cassettes. On avait droit à cinq films et j’en prenais cinq. Toujours le maximum.  » Rétrospectivement, ses goûts annonçaient pourtant bien quelque chose : « Je ne prenais que de l’horreur, Massacre à la tronçonneuse, du Cronenberg (NDLR  : on lui doit notamment La Mouche), plein de trucs. J’ai dû tous les voir, du nanar, de la série B, la série Z, au bon film. C’était mon univers. »

« J’adorais me faire peur »

Côté bouquins, Franck Thilliez n’est pas, à l’époque, un fou de littérature. « Je n’étais pas un grand lecteur. Mais j’avais aussi un univers un peu Horreur. Stephen King, Graham Masterton… Je lisais des auteurs qui écrivaient vraiment dans l’horreur. J’adorais me faire peur, cette capacité à transmettre de la peur par une création, un film, un livre… Je crois que c’est ce qui m’a donné envie d’écrire» Mais ça, il ne le sait pas encore.

Soudain, sa vie bascule

Tout a commencé comme dans un polar. Dans la banalité du quotidien. Un quotidien qui va basculer, happé par un engrenage froid et inarrêtable. Aucun retour en arrière possible. Franck Thilliez est alors ingénieur chez Arcelor.

Il raconte : « Je continuais à regarder des films, tout ça… Et une histoire s’est mise dans ma tête. J’y pensais tous les jours. Avec des personnages… À moment donné, je pense qu’elle a eu besoin de sortir. Je me suis dit : si j’essayais de l’écrire ? C’est presque venu du jour au lendemain. Un soir, en rentrant de ma journée de boulot, je me suis mis devant mon ordinateur. Je me suis mis à écrire et ça a donné Conscience animale»

Il pousse la confidence : «  Je pense que j’avais besoin de ressortir toute cette somme d’images un peu sombres accumulées dans toute ma jeunesse. C’est pour cela que ce premier roman est une espèce de mélange de roman d’horreur-policier, mais très naïf. Une série B du livre. Mais qui avait finalement quelques adeptes. Des gens essaient de le trouver aujourd’hui et disent qu’on ressent l’univers. Mais c’est très différent de ce que je fais aujourd’hui. Et très gore. »

Bref. Le premier roman de Franck Thilliez venait de sortir de son imaginaire. Il comprend alors une chose essentielle : «  Je me suis rendu compte que j’avais une capacité à raconter des histoires. C’est-à-dire, à transformer des images en une histoire qu’on peut suivre et qui évolue, en y prenant du plaisir. »

Mais la source de l’imaginaire peut-elle se tarir ? Franck Thilliez nous livre une réponse surprenante dans le cinquième volet de cette série. Avant cela, ne manquez pas le face-à-face entre Docteur Thilliez et Mister Sharko.