À Calais, l’exposition « Quels beaux visages ! » élargit le champ du portrait


Par portrait, qui peut être autoportrait, on entend visage, mais il s’applique aussi au corps et au groupe, qu’ils soient « peints, dessinés, photographiés, sculptés » comme dit l’introduction à cette exposition riche d’une centaine d’oeuvres.
Trois volets rythment la visite. C’est le visage de Michael Jackson sous un voile de dentelle qui vous accueille. Le tirage date de 2001, mais la photo de Greg Gorman daterait de 1987. La dentelle est de Calais, assure Anne-Claire Laronde « même si elle a été produite aux États-Unis, où il y a des métiers Leavers. » La photo est une acquisition de la Cité de la Dentelle et de la Mode.
Dans cette première étape dédiée aux portraits et autoportraits, le Roi de la Pop est en bonne compagnie, face à une lascive Ava Gardner, bouche entrouverte sur un oreiller, à côté de Paulette Goddard, brièvement épouse de Charlie Chaplin et ici photographiée par Man Ray, en corset, les aisselles offertes aux regards : « Une attitude provocante pour l’époque » indique Anne-Claire Laronde.
Beaucoup plus chaste, presque en ironique madone, l’icône pop Lio par le duo de photographes Pierre & Gilles paraît minuscule dans son austère cadre en bois ultra-massif : « Tel que l’ont voulu les artistes » précise la directrice, qui pointe le lien entre le travail de Pierre & Gilles avec la culture « queer », le kitsch délibéré mais aussi l’influence pop art d’Andy Warhol.
Autre don d’artiste, « Le Paravent » de Catherine Viollet où elle se représente dans la même position que Paulette Goddard, mais nue, et à côté de son idole Bruce Springsteen. Catherine Viollet relève à la fois de l’esprit punk qui a soufflé sur la production française des années 80, mais aussi d’un élan féministe qui lui a permis de s’imposer dans le courant très masculin de la Figuration Libre.
Ce Paravent fait la transition avec le deuxième temps de l’exposition, celui consacré aux portraits de groupes, où l’on retrouve les visages d’adolescents Calaisiens qui ont aujourd’hui la quarantaine.
Le troisième volet est plus sombre, il salue les oubliés. On y retrouve la peinture au pochoir sur une authentique boîte à lettres de C215, vue lors de « Libres Figurations » et offerte par l’artiste au musée. C215 y rend hommage aux tirailleurs sénégalais. On y voit également trois photographies de Laura Henno en 2012-2013, acquises par le musée alors sous la direction de Barbara Forest. Intitulées « L’attente », « Les Revenants » et « Cascade », elles illustrent la situation dramatique des exilés à Calais. Ces tirages seront exposés en permanence dans l’espace que consacrera, dans les années à venir, le musée à l’histoire de Calais.